NFU Campaign: Save Our Seed

Fiche d’information – Incorporation par référence

Cette fiche d’information vous aidera à comprendre comment fonctionne l’incorporation par référence en tant qu’outil réglementaire, comment elle pourrait être utilisée dans notre système de réglementation des semences et ce que cela pourrait signifier pour les fermières.

Couverture de la fiche d'information sur l'IBR

L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) mène actuellement un processus de modernisation de la réglementation sur les semences qui pourrait apporter des changements majeurs à notre système. L’incorporation par référence (IBR) est proposée comme moyen d’accélérer les modifications des règlements sur les semences à l’avenir. Toutefois, cette rapidité accrue peut se faire au détriment de la transparence et de la responsabilité publique. Pour mieux évaluer les implications de l’IBR, nous devons voir comment il s’inscrit dans le rôle et l’objectif plus larges des réglementations.

Qu’est-ce qu’un règlement ?

Les règlements sont une forme de droit. Il s’agit des règles utilisées pour mettre en œuvre l’intention des actes (lois ou statuts) adoptés par le Parlement. Les règlements sont des outils juridiques qui mettent en œuvre la législation et font partie du cadre démocratique qui régit les personnes et les entreprises au Canada. Les lois délèguent le pouvoir de prendre des règlements au gouverneur en conseil (le gouverneur général agissant sur l’avis du cabinet), à un ministre spécifique ou à une agence administrative. De cette manière, la loi crée le cadre nécessaire pour mettre en œuvre l’objectif de la loi par le biais de règlements. Le libellé des règlements comprend souvent des définitions, des spécifications, des exemptions, des sanctions et d’autres détails qui définissent la manière dont la loi doit être appliquée.

Avant d’entrer en vigueur, un règlement doit être publié dans la Gazette du Canada, le journal officiel du gouvernement du Canada. Lorsqu’un nouveau règlement ou une modification d’un règlement existant est proposé, le texte est publié dans la Gazette du Canada – Partie I, accompagné des raisons qui le motivent et d’une analyse de son impact. Le public a la possibilité de faire part de ses commentaires pendant une période de consultation publique définie. L’organisme responsable du règlement prendra ensuite en considération les commentaires du public lorsqu’il rédigera la version finale du règlement pour approbation par l’autorité désignée dans la loi d’habilitation. Une fois approuvé, le nouveau règlement ou le règlement révisé entre en vigueur lorsqu’il est publié dans la Gazette du Canada – Partie II. Il est ensuite ajouté aux règlements publiés sur le site web du gouvernement du Canada.

Qu’est-ce que l’incorporation par référence ?

Lorsque la loi sur la croissance agricole a été adoptée en 2014, elle a modifié plusieurs lois agricoles, dont la loi sur les semences, afin de permettre l’incorporation de règlements par référence. Au lieu d’intégrer la formulation de la règle dans le texte du règlement, ce dernier se contenterait de « renvoyer » à un autre document créé en dehors des processus d’élaboration des règlements du Canada. Un document IBR peut être incorporé tel qu’il a été rédigé à une date précise, ou tel qu’il peut être modifié de temps à autre par l’organisme responsable du document. Toute modification des documents de l’IBR n’aurait pas à être approuvée par les personnes que la loi autorise à approuver les modifications de ses règlements, comme le Cabinet. Les documents incorporés par référence ont force de loi : il est illégal pour les personnes et les entreprises d’y déroger. Les documents de l’IBR doivent être « accessibles » au public, mais il n’existe pas de méthode standard pour les trouver. Les documents IBR ne sont pas publiés dans la Gazette du Canada.

Qui tient le stylo ?

Les documents incorporés par référence peuvent être « internes » ou « externes ». Les documents internes sont créés et gérés au sein du gouvernement canadien. Les documents externes appartiennent à une organisation ou une agence extérieure. Une différence essentielle entre les documents internes et externes est de savoir « qui tient le stylo », c’est-à-dire qui a le pouvoir de modifier la formulation d’un document, et donc les règles.

Dans le cadre du processus de modernisation de la réglementation sur les semences, l’IBR est envisagé pour plusieurs éléments de notre réglementation sur les semences. Si l’ACIA tient la plume, le document sera interne et toute modification des documents incorporés devra passer par une procédure élaborée par notre gouvernement. Si une tierce partie, telle que Seeds Canada, tenait la plume, le document serait externe ; dans le contexte du règlement sur les semences, il s’agirait d’un conflit d’intérêts inacceptable, car cela permettrait à une association de sociétés semencières de concevoir les règles qui régissent leurs activités au Canada pour leur propre bénéfice privé, au détriment des fermières et du grand public.

Pourtant, même si l’ACIA tient la plume, les modifications proposées pour les documents IBR ne seront pas publiées dans la Gazette du Canada. Il appartiendra à l’ACIA d’informer les parties prenantes et de solliciter leur avis. Dans un certain nombre de consultations antérieures de l’ACIA relatives aux semences, les fermières n’ont pas été considérées comme des « parties prenantes ». Le processus IBR a des délais encore plus courts et, comme la participation exige des ressources et une expertise importantes, il pourrait facilement être influencé par des entreprises désireuses de promouvoir des règles qui leur permettraient d’accroître leur part de marché, de réduire leurs coûts et de pratiquer des prix plus élevés pour leurs produits.

Quels sont les risques de l’IBR ?

Il est plus rapide, moins transparent et moins rigoureux de modifier les documents IBR que de modifier les règlements proprement dits. Lorsque la Loi sur la croissance agricole a été présentée en 2014, la Nationale des Fermiers s’est opposée à l’IBR parce qu’en permettant que le document incorporé soit modifié par un tiers, les particuliers et les entreprises du Canada seraient régis par des règles qui pourraient être modifiées à l’insu ou sans l’approbation de l’organisme délégué par le Parlement pour autoriser la réglementation.

Le lobby des entreprises semencières l’a bien compris et souhaite une application plus large de l’IBR afin de pouvoir modifier plus facilement la réglementation sur les semences à l’avenir. Dans son livre blanc de 2018, Seed Synergy (le groupe de pression CropLife, spécialisé dans les biotechnologies et les pesticides, ainsi que les groupes qui ont ensuite formé Seeds Canada) a déclaré que l’utilisation de l’IBR pour apporter des changements au règlement sur les semences était l’un de ses objectifs. Selon eux, « un document définissant des exigences techniques détaillées en matière de qualité des semences pourrait être établi et tenu à jour par l’industrie et incorporé dans le règlement sur les semences par référence, ce qui éviterait d’avoir à mettre en place un processus réglementaire fédéral long et coûteux à chaque fois que des ajustements mineurs sont nécessaires ». Il recommande en outre que « toutes les exigences relatives à la certification des semences soient supprimées du règlement sur les semences et gérées par incorporation par référence ». Ce scénario donnerait aux entreprises semencières intéressées le pouvoir d’affaiblir ou de supprimer les normes qui fournissent de manière transparente les données relatives au contrôle de la qualité et aux essais sur lesquelles les fermières s’appuient pour prendre des décisions en connaissance de cause afin de produire des cultures avec succès dans nos conditions de croissance.

L’IBR réduit la transparence de notre système réglementaire et accroît le risque que le secteur des entreprises exerce une influence indue sur l’élaboration des règles. La nécessité de modifier rapidement la réglementation sur les semences est discutable, étant donné que les semences sont un élément fondamental de l’agriculture et que les changements apportés à la manière dont les semences sont régies auront des répercussions étendues et durables.

Le processus de modernisation de la réglementation des semences de l’ACIA offrira aux fermières plusieurs occasions de faire connaître leur point de vue. Veillons à ce qu’ils sachent que nous voulons nous assurer que les futurs changements réglementaires bénéficieront d’une réflexion approfondie et délibérée, de la transparence et du processus largement inclusif offert par la Gazette du Canada, afin de garantir que les règles qui régissent les semences sont réellement dans l’intérêt du public.

Des questions ?

N’hésitez pas à nous contacter pour obtenir de plus amples informations sur la réglementation canadienne en matière de semences. Visitez le site www.nfu.ca/seed-regs ou envoyez un courriel à nfu@nfu.ca en indiquant « Règlement sur les semences » dans l’objet du message.

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