National | Communiqué de presse

La Journée internationale de la lutte paysanne est commémorée par une déclaration contre l’UPOV 91

(17 avril 2015)- The () et l’Union Paysanne (UP) marquent le 17 avril 2015, la Journée internationale de la lutte paysanne[*] en se joignant à d’autres organisations canadiennes pour dénoncer l’adoption récente du projet de loi C-18, la Loi sur la croissance agricole, et demander au gouvernement du Canada de revenir sur les récents changements apportés à la Loi sur la protection des obtentions végétales qui ont placé le Canada sous le régime de l’UPOV ’91. Les groupes exhortent les partis fédéraux à s’engager à reconstruire la capacité de sélection végétale publique du Canada et à développer un système de semences qui fonctionne pour les fermières et les gens.

« Après des millénaires de partage et d’amélioration libres des ressources génétiques entre les fermiers du monde entier, les gouvernements canadiens successifs ont réduit des programmes publics de sélection végétale très efficaces et ont pris des mesures pour empêcher les fermiers d’accéder à ces ressources en étendant les droits d’obtenteur et en donnant aux investisseurs privés mondiaux des pouvoirs exclusifs sur les semences de nouvelles variétés de plantes », a déclaré Jan Slomp, président du site . « La biodiversité est le moyen naturel de faciliter l’adaptation. Les fermières doivent avoir pleinement accès à la diversité des semences afin que nous puissions les utiliser et les adapter en fonction du changement climatique, des conditions de croissance uniques et des marchés locaux. »

« Les semences sont à la base de notre système alimentaire. Le contrôle des semences par les fermières est donc fondamental pour la souveraineté alimentaire », a déclaré Benoit Girouard, président de l’UP. « La cession de notre patrimoine de ressources génétiques au secteur commercial, dominé par quelques entreprises mondiales, est une parodie qui met véritablement en péril la biodiversité et la souveraineté alimentaire.

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Pour plus d’informations :

Jan Slomp, Président : (403) 704-4364 ou (250) 898-8223

Benoit Girouard, président de l’UP : (450) 495-1910

Texte de la déclaration commune :

Les groupes dénoncent l’adoption par le Canada du régime de protection des obtentions végétales de l’UPOV 91 avec l’adoption du projet de loi C-18, la loi sur la croissance agricole.

Le 25 février 2015, le projet de loi C-18, la Loi sur la croissance agricole, a reçu la sanction royale et est devenu loi. Les organisations soussignées déplorent que le gouvernement fédéral, avec le soutien du Parti libéral, ait adopté ce projet de loi omnibus, qui fait entrer la loi canadienne sur les droits d’obtenteur dans le régime des droits d’obtenteur de l’UPOV 91.

L’UPOV 91 n’est pas nécessaire pour l’innovation ou le commerce. Le Canada peut respecter ses obligations en matière de commerce international dans le cadre de l’OMC en adoptant une loi sur les semences « sui generis » (unique ou « fabriquée au Canada »). Dans d’autres pays, l’UPOV 91 a davantage aidé les entreprises que les fermières. Le système de l’UPOV donne la priorité aux intérêts d’un petit nombre d’entreprises mondiales qui dominent la sélection végétale commerciale. La majorité des 196 pays du monde n’utilisent pas l’UPOV et, à ce jour, seuls 52 des 72 pays qui l’utilisent sont soumis au système UPOV 91. Le Chili a récemment abandonné sa proposition de loi UPOV 91 et de nombreux autres pays qui envisagent d’adopter l’UPOV 91 s’y opposent fermement.

En adoptant laloi sur la croissance de l’ agriculture et en adoptant l’UPOV 91, le gouvernement fédéral fait ce qui suit :

  • permet aux entreprises de mieux contrôler les semences ;
  • augmente la capacité des sociétés de semences à percevoir des redevances auprès des fermières ;
  • permet de collecter des redevances sur l’ensemble de la culture, ce qui augmente considérablement les possibilités pour les entreprises d’obtenir des revenus plus élevés de la part des fermières ;
  • réduit les coûts des sociétés de semences en facilitant les importations de semences et donc la vente de variétés déjà développées pour les marchés étrangers et les conditions de culture d’autres pays, au lieu de développer des variétés adaptées au marché canadien ;
  • transforme le droit des fermières de conserver des semences en un privilège et permet de le limiter ou de le supprimer complètement par voie réglementaire ;
  • expose les fermières qui conservent des semences pour les utiliser sur leur propre exploitation à des poursuites judiciaires, car la loi ne définit pas le terme « stockage » (conservation de semences en vue d’une utilisation future), par exemple. Les sociétés semencières poursuivront les fermières pour obtenir des décisions de justice favorables à l’interprétation de la nouvelle loi. Les procès sont très coûteux et désavantagent les fermières en termes de défense. Ils peuvent donc être utilisés comme une menace pour inciter les fermières à acheter des semences chaque année au lieu de conserver et de planter leurs propres semences de ferme ;
  • Compte tenu de la politique du gouvernement actuel consistant à supprimer le financement de la sélection végétale publique d’importantes cultures céréalières, la loi sur la croissance agricole réduit l’accès des fermières aux nouvelles variétés potentielles qui auraient été développées par les chercheurs d’Agriculture Canada en soutenant un système dans lequel seules les nouvelles variétés qui correspondent aux objectifs des entreprises (telles que les semences qui dépendent des intrants achetés) seront commercialisées ;
  • incite fortement les entreprises semencières à désenregistrer les anciennes variétés tombées dans le domaine public ou relevant de l’UPOV 78 afin d’accroître leur marché pour les nouvelles variétés relevant de l’UPOV 91. Les fermiers qui continuent à utiliser d’anciennes variétés désenregistrées pour des raisons agronomiques risquent également de ne plus pouvoir bénéficier des programmes de soutien agricole qui exigent l’utilisation de semences enregistrées.
  • accroît le déséquilibre des pouvoirs entre les fermières et les entreprises en favorisant le transfert de richesses des fermières vers les entreprises par le biais des redevances. Cela augmentera la concentration de la propriété dans la chaîne d’approvisionnement agricole (les entreprises de semences vendent également des intrants agricoles et/ou achètent des céréales) ; et
  • permet aux entreprises de contrôler et de percevoir des redevances sur les futures variétés développées par d’autres si elles sont considérées comme « essentiellement dérivées » d’une variété protégée par le droit d’obtenteur. Compte tenu de la politique du gouvernement visant à vendre le matériel génétique développé par le secteur public, cette loi facilite la privatisation du patrimoine des ressources phytogénétiques du Canada.

Bon nombre des organisations qui se sont exprimées haut et fort en faveur de la loi sur la croissance de l’agriculture étaient étroitement associées à l’industrie semencière, dépendaient du financement du gouvernement fédéral et/ou recevaient un soutien financier de la part des entreprises semencières. (voir Qu’est-ce qui se cache derrière la campagne de relations publiques de Partners in Innovation ? http://www.nfu.ca/issue/what-behind-partners-innovation-pr-campaign)

Nous demandons donc au gouvernement du Canada de ne pas ratifier la Convention UPOV 91.

Nous appelons également tous les partis politiques fédéraux à :

  • s’engager à abroger les modifications apportées à la loi sur la protection des obtentions végétales;
  • maintenir le Canada dans le cadre de l’UPOV 78 ;
  • mettre en place une loi sur les semences fermières qui garantira aux agriculteurs canadiens le contrôle de leurs semences
  • s’engager à nouveau à soutenir la sélection végétale effectuée dans l’intérêt public.

Signé : Les AmiEs de la Terre de Québec

Réseau canadien d’action sur les biotechnologies

Alliance de la Commission canadienne du blé

Comox Valley Growers and Seed Savers (producteurs et conservateurs de semences de la vallée de la Comox)

CAPÉ (Coopérative pour l’agriculture de proximité écologique)

Conseil des Canadiens

Développement et Paix

Sécurité alimentaire au Canada

GRAIN

Producteurs d’aliments biologiques du Yukon

Slow Food Montréal

L’Église unie du Canada

Union Paysanne

Vigilance OGM


[*]Histoire de la Journée internationale de la lutte paysanne : Le 17 avril 1996, dans l’État amazonien du Pará, à Eldorado dos Carajás, la police militaire de l’État a massacré des paysans organisés au sein du Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST), tuant 19 personnes. Ce jour-là, 1 500 femmes et hommes organisés au sein du MST ont occupé et bloqué l’autoroute BR-150 à Eldo-ado dos Carajás, dans l’intention de faire pression sur les gouvernements fédéral et de l’État pour obtenir une réforme agraire. Vers 16 heures, 155 membres de la police militaire de l’État, répartis en deux brigades, ont encerclé le MST sur l’autoroute, tirant des gaz lacrymogènes, des balles réelles et des mitrailleuses. Outre les 19 MST tués pendant le massacre, trois autres sont morts plus tard des suites de leurs blessures, et 69 personnes ont été blessées. Les autorités de l’État, la police, l’armée et les puissants propriétaires terriens locaux ont participé à la planification et à l’exécution du massacre. Dix-huit ans plus tard, en 2012, deux des responsables du massacre d’Eldorado dos Carajás ont été emprisonnés, mais les conditions économiques et sociales à l’origine du conflit perdurent.