Policy

Note d’information de l’UNF sur les orientations réglementaires proposées en matière d’édition de gènes.

NOTE D’INFORMATION de l’Union Nationale des Fermiers concernant les directives réglementaires proposées pour les plantes et les semences produites à l’aide de nouvelles biotechnologies (édition de gènes).

Recommandations à Santé Canada :
– Tous les produits génétiquement modifiés, y compris ceux qui ne contiennent pas d’ADN étranger, devraient être réglementés en tant que nouveaux produits et donc faire l’objet d’une évaluation de la sécurité par le gouvernement et d’une notification préalable à la mise sur le marché.
– Nous recommandons que tous les retransformants continuent d’être évalués comme de nouvelles plantes à caractères nouveaux (PNT).

Pour une justification détaillée, veuillez consulter le document de l’UNF concernant les orientations proposées par Santé Canada.

Recommandation à l’Agence canadienne d’inspection des aliments :
– Toutes les semences génétiquement modifiées, y compris celles développées à l’aide de la technologie d’édition génétique, devraient être réglementées en tant que VCN et donc soumises à la partie V du règlement sur les semences.

Pour une justification détaillée, veuillez consulter le mémoire de l’UNF concernant les orientations proposées par l’ACIA.

RÉSUMÉ DE NOS PRÉOCCUPATIONS

  • Les fermiere sont des parties prenantes
  • Les orientations réglementaires sont destinées à clarifier et non à modifier les règlements.
  • L’engagement du Canada en faveur de la science est menacé
  • Les lignes directrices ne sont pas à l’épreuve du temps
  • La réglementation est nécessaire à la confiance du public
  • Les plantes génétiquement modifiées SONT nouvelles et doivent être réglementées en tant que telles.
  • La transparence nécessite une autorité réglementaire
  • Les produits non réglementés présentent un risque élevé de rejet du marché
  • Une réglementation obligatoire apporterait de la certitude
  • L’édition de gènes n’est pas nécessairement bénéfique pour les fermières
  • Le gouvernement a pour mission de protéger
  • Décision nécessaire

Les fermiere sont des parties prenantes
Dès le début de l’élaboration des orientations réglementaires, la définition des « parties prenantes » a été limitée aux parties réglementées et non à toutes les personnes concernées par la réglementation. Parce qu’ils ont passé trop de temps avec les parties réglementées et non avec les fermières, les régulateurs ont manqué des impacts importants que le ministre de la santé et le ministre de l’agriculture et de l’agroalimentaire doivent connaître avant de prendre une décision.

Les fermiers sont des parties prenantes parce qu’ils plantent des graines, cultivent des produits et que notre subsistance dépend de leur commercialisation à un bon prix. De nombreux fermiers utiliseront les produits des nouvelles biotechnologies connues sous le nom d’édition du génome ou d’édition des gènes. Beaucoup d’entre nous utilisent également des cultures produites par d’autres, par exemple comme aliments pour le bétail ou comme ingrédients dans la transformation des aliments à la ferme. Nous sommes sensibles à nos propres coûts de production ainsi qu’aux besoins et désirs des clients et aux prix qu’ils sont prêts à payer. Nous sommes également les gardiens de la terre et nos décisions agricoles affectent la viabilité de notre futur environnement agricole.

Les produits génétiquement modifiés doivent être réglementés parce que les fermières les utilisent (semences). La certification biologique interdit les produits issus du génie génétique, y compris ceux qui sont produits à l’aide de nouvelles biotechnologies. Un débat international sur l’acceptabilité de l’édition de gènes dans l’agriculture peut avoir lieu, et les fermières paieront le prix de la controverse.

La réglementation des produits génétiquement modifiés a également des implications pour les transformateurs de denrées alimentaires. Certains fermiers transforment leurs produits à la ferme, mais la plupart d’entre eux vendent leurs produits à des entreprises de transformation alimentaire, directement ou indirectement par l’intermédiaire du marché des produits de base. Lorsqu’ils desservent un marché sensible, les fermiers et les transformateurs de produits alimentaires doivent pouvoir être sûrs qu’ils utilisent des produits non modifiés génétiquement.

Les orientations réglementaires sont destinées à clarifier et non à modifier les règlements.
Les orientations réglementaires sont un outil destiné à aider les parties réglementées à se mettre en conformité. Les orientations réglementaires ne doivent pas modifier l’intention du règlement. Il est clair que l’intention du règlement sur les nouveaux aliments et de la partie V du règlement de la loi sur les semences était de réglementer les VCN et non de fournir des mécanismes permettant aux entreprises d’éviter la réglementation.

L’engagement du Canada en faveur de la science est menacé
Les lignes directrices proposées affirment que toutes les données scientifiques nécessaires à la protection de la santé et de l’environnement existent déjà et sont connues en ce qui concerne les semences génétiquement modifiées qui ne contiennent pas d’ADN étranger. Cela va à l’encontre du processus scientifique, qui crée toujours de nouvelles connaissances. Ces orientations ne doivent pas amener le Canada à s’écarter de son engagement à long terme en faveur d’une prise de décision et d’une réglementation fondées sur la science.

Les lignes directrices ne sont pas à l’épreuve du temps
Nous ne savons pas quelles technologies et quels résultats seront obtenus à l’avenir, et nous ne pouvons pas savoir à l’avance s’ils nécessiteront une surveillance accrue.

En exigeant une réglementation dès maintenant, on s’assure que les régulateurs auront la capacité de faire face aux problèmes imprévus et aux nouvelles technologies à l’avenir, alors qu’en exemptant les plantes génétiquement modifiées de réglementation dès maintenant, Santé Canada et l’ACIA ne disposeront pas d’outils si un contrôle s’avère nécessaire à l’avenir.

L’élaboration et le maintien d’une autorité réglementaire pour toutes les plantes génétiquement modifiées permettront au personnel de Santé Canada et de l’ACIA d’approfondir ses connaissances au fur et à mesure de l’invention et de l’application de nouvelles techniques biotechnologiques. En tant que fonctionnaires, travaillant dans l’intérêt public indépendamment de l’industrie, ces scientifiques seront en mesure de protéger les Canadiens contre les risques émergents et inattendus, le cas échéant.

En veillant à ce que toutes les plantes génétiquement modifiées fassent l’objet d’une évaluation de sécurité par le gouvernement avant d’être disséminées dans l’environnement et sur le marché, on réduira le risque de surprises lorsque les plantes ne fonctionnent pas comme prévu, et on fournira au régulateur des outils pour contrôler et gérer toute surprise qui se produirait.

La réglementation est nécessaire à la confiance du public
Une réglementation de qualité, d’intérêt public, fondée sur la science et transparente est essentielle pour maintenir la confiance du public dans le système alimentaire et dans le gouvernement lui-même. Le manque de transparence et l’abandon de la science que représentent ces propositions de lignes directrices nuiront à la confiance du public dans le Canada et à la réputation internationale du pays. Elle nuira à la capacité de Santé Canada de protéger la santé des Canadiens et à celle de l’ACIA de maintenir un approvisionnement alimentaire de qualité, de protéger l’environnement et de préserver les marchés pour les producteurs canadiens.

Les plantes génétiquement modifiées SONT des nouveautés et doivent être réglementées en tant que telles.
De nouvelles découvertes sur la capacité de la technologie d’édition de gènes à surmonter les défenses des cellules montrent que l’édition de gènes crée de nouvelles plantes qui n’ont pas d’antécédents d’utilisation sûre au Canada ou ailleurs. Même lorsqu’il n’y a pas d’ADN étranger incorporé, il est impossible que ces changements génétiques aient pu se produire auparavant dans la nature. Les effets de ces produits sur la sécurité alimentaire et l’environnement n’ont jamais été observés auparavant par l’homme ou les écosystèmes.

L’édition de gènes EST du génie génétique et les plantes développées à l’aide de l’édition de gènes SONT nouvelles.

« L’édition du génome a le pouvoir sans précédent de rendre de grandes parties du génome accessibles au changement, en passant outre les mécanismes naturels d’organisation du génome tels que les mécanismes de réparation ou les gènes de sauvegarde. Ainsi, les nouvelles techniques d’édition du génome peuvent provoquer des changements généralisés dans le génome des plantes et des animaux, sans insérer de gènes « étrangers » supplémentaires.

De nombreuses études évaluées par des pairs et publiées au cours des cinq dernières années montrent que les techniques d’édition de gènes peuvent produire de nouveaux génotypes et de nouvelles caractéristiques biologiques en modifiant des zones du génome qui sont essentielles à la survie et qui sont normalement protégées contre les mutations. Lorsqu’une telle zone protégée est coupée par des « ciseaux » d’édition de gènes tels que CRIPR/Cas9, la cellule réintroduit la séquence cible, que les ciseaux génétiques couperont encore et encore jusqu’à ce que la réparation propre à la cellule échoue et que la modification du gène édité soit établie. L’édition du génome modifierait également les gènes non ciblés qui contiennent la même séquence d’ADN que celle visée par les « ciseaux » génétiques. L’édition de gènes obligerait à modifier génétiquement tous les sites du génome qui contiennent la séquence cible, empêchant ainsi la cellule de conserver sa fonction normale dans ces zones.

En outre, les « ciseaux » d’édition de gènes peuvent créer des plantes dont l’ADN subit des modifications structurelles plus importantes, en déplaçant des gènes vers de nouveaux emplacements, en supprimant des gènes, en ajoutant des gènes en double, en brouillant ou en inversant l’ordre des séquences du code ADN à l’intérieur des chromosomes. Les effets de ces changements sur la santé et l’environnement sont inconnus.

De tels changements génétiques ne sont pas aléatoires : la possibilité qu’ils se produisent naturellement est infiniment faible. Il est donc faux de prétendre que les plantes génétiquement modifiées qui ne contiennent pas d’ADN étranger sont « identiques » aux plantes sélectionnées de manière conventionnelle. La puissance et l’attrait de cette technologie résident dans sa capacité à surmonter les mécanismes évolutifs des cellules qui protègent certaines zones du génome contre les mutations.

Cette persistance et cette neutralisation des mécanismes de protection de la cellule font de l’édition du génome une nouvelle technologie aux capacités et aux conséquences inédites. Les organismes qui en résultent n’ont pas d’antécédents d’utilisation sûre et leur sécurité doit donc être évaluée.

La transparence nécessite une autorité réglementaire
L’autorité réglementaire sur tous les produits génétiquement modifiés garantirait que Santé Canada et l’ACIA disposent des informations nécessaires pour assurer la transparence. Les entreprises peuvent s’engager à fournir volontairement des listes de produits génétiquement modifiés qui sont considérés comme « non nouveaux » selon la définition erronée de la directive (décrite ci-dessus), mais cela ne peut pas être considéré comme de la transparence. Les entreprises ont tout intérêt à ne pas révéler si un produit a été modifié génétiquement, comme l’illustre l’histoire du canola Cibus :

Falco™ Cibus can ola – Un article de presse de 2016 faisant la promotion de la nouvelle variété de canola bientôt lancée par Cibus indiquait que  » SU canola est le premier produit de semence commercial de Cibus qui a été développé à l’aide d’une procédure d’édition génétique brevetée connue sous le nom de système de développement rapide des caractères (RTDS) « …. En 2019, Cibus a lancé ses deux variétés de canola Falco™, précisant dans son communiqué de presse : « Cibus est une société de biotechnologie qui utilise des technologies de pointe pour développer des caractéristiques végétales souhaitables pour l’industrie mondiale des semences en éditant précisément les gènes d’une plante sans intégrer de matériel génétique étranger. » Toutefois, après la publication par un groupe d’intérêt public d’une méthode permettant de détecter l’édition de gènes dans ces variétés, Cibus a demandé à l’ACIA de modifier son document de décision pour indiquer que le caractère de tolérance à l’herbicide de la plante avait été sélectionné par mutation spontanée, et non par mutagénèse dirigée par oligonucléotide, comme indiqué initialement. La mutagenèse dirigée par oligonucléotide est une technique d’édition de gènes utilisée pour modifier la séquence d’un gène dans un génome.

La seule façon d’assurer la transparence est de veiller à ce que l’entreprise obtienne l’approbation des autorités réglementaires avant la mise sur le marché.

Les produits non réglementés risquent fort d’être rejetés par le marché
Les produits génétiquement modifiés sont controversés. Ils sont interdits dans la production biologique certifiée, un marché solide et en pleine croissance au Canada. Le rejet par les consommateurs de produits controversés peut constituer une force de marché suffisamment puissante pour entraîner le rejet de produits même lorsque ceux-ci ont été approuvés par les autorités réglementaires. Ainsi, pour protéger les marchés, toutes les plantes génétiquement modifiées doivent être réglementées afin de garantir qu’elles fassent l’objet d’une notification préalable à la mise sur le marché (Santé Canada) et d’une identification des VCN (règlement d’application de la loi sur les semences), ce qui permettra aux fermières de choisir leurs semences en connaissance de cause si elles produisent pour un marché sensible, et aux transformateurs alimentaires et aux acheteurs de céréales de séparer les produits si nécessaire afin d’éviter un rejet du marché et/ou des réductions de prix.

Les pertes dues au rejet du marché vont au-delà de l’agriculteur individuel qui peut avoir livré par inadvertance une variété non acceptée sur le marché en question. L’ensemble du chargement peut être rejeté, ce qui entraîne des pertes pour les autres fermiers ; et le Canada peut être considéré comme un fournisseur peu fiable, ce qui se traduit par des prix réduits pour tous les fermiers canadiens qui vendent le produit. Les conséquences de la destruction du marché sont immenses, comme l’illustrent les histoires suivantes :

Lin Triffid – Le lin génétiquement modifié « Triffid » a été approuvé par l’ACIA en 1996 et par Santé Canada en 1998, et enregistré comme variété de VCN. Après une pression extrême de la part des fermières et des organisations en raison des inquiétudes concernant l’impact sur le marché, la variété a été annulée en 2001, de sorte que Triffid n’a jamais été cultivée commercialement ou vendue au Canada. Toutefois, à la fin de l’année 2009, des tests effectués en Europe et ailleurs ont révélé une contamination généralisée, ce qui a donné lieu à des titres tels que « Le Japon trouve des OGM dans des cargaisons de lin canadien ». Avant l’apparition du Triffid, 70 % des exportations de lin canadien étaient destinées à l’Europe, mais les ventes ont chuté de 95 %, passant d’un niveau élevé de 400 000 tonnes par an à seulement 20 000 tonnes par an en 2011, après la détection du Triffid dans les cargaisons. Les coûts liés à la perte de marché et à la réhabilitation de l’offre de semences ont été supportés par tous les fermiers, et pas seulement par ceux dont les cultures contenaient la variété non enregistrée.

Maïs Starlink – En 2000, les États-Unis ont autorisé l’utilisation du maïs génétiquement modifié Starlink pour l’alimentation animale, mais pas pour la consommation humaine, en raison de craintes quant à son caractère allergène. L’entreprise a tenté de séparer les ventes destinées à l’alimentation animale de celles destinées à la consommation humaine. Toutefois, le maïs Starlink a ensuite été retrouvé dans des produits alimentaires tels que les coquilles de tacos. Les produits concernés ont été rappelés et le développeur de semences, Aventis (aujourd’hui Bayer), a dû mettre en place le programme StarLink Enhanced Stewardship pour les retirer du système de production, ce qui a coûté jusqu’à un milliard de dollars. Les fermières qui n’ont pas cultivé Starlink ont subi des pertes en raison des réductions de prix liées à la contamination, et ont obtenu un règlement de 100 millions de dollars de la part des entreprises.

Maïs non approuvé – En avril 2020, l’Ontario Agri Business Association et les Grain Farmers of Ontario ont publié une déclaration commune à l’intention des fermières pour les informer de la vente de certaines variétés hybrides de maïs à caractères empilés génétiquement modifiées qui n’avaient pas encore été approuvées par les principaux marchés d’exportation, y compris l’Union Fermière. Les ventes à l’Europe représentent 65 % de la valeur totale des exportations de maïs canadien. Les fermiers cultivant ces variétés ont été invités à vérifier auprès de leur acheteur avant de livrer, et si celui-ci n’était pas disposé à accepter le maïs, les fermiers étaient chargés de trouver un autre acheteur qui accepterait le maïs à des fins d’alimentation animale ou humaine nationale. Il incombait donc aux fermières de protéger le précieux marché d’exportation.

Situation du bœuf aux hormones en Europe – Sur certains marchés, le rejet des consommateurs est un facteur plus important que les obstacles réglementaires ou juridiques. À la fin des années 1980, l’Europe a interdit la viande bovine produite à l’aide de certaines hormones synthétiques. Le Canada a contesté cette décision auprès de l’Organisation mondiale du commerce et, après de nombreuses années, a obtenu une décision favorable. L’Europe a toutefois décidé de payer la pénalité pour le maintien de la barrière commerciale non tarifaire. En 2017, le Canada a abandonné la contestation commerciale et, dans le cadre de l’AECG, a obtenu l’accès au marché pour 50 000 tonnes de bœuf traité aux hormones par an. Malgré un accès généreux au marché, moins d’un pour cent des exportations de viande bovine du Canada sont destinées à l’Europe.

Les orientations réglementaires proposées empêcheraient les fermières d’avoir une confiance totale dans le statut de leurs semences génétiquement modifiées. La création proposée d’une catégorie de semences et de plantes génétiquement modifiées, non réglementées et non soumises à l’obligation de divulgation, ferait injustement peser sur les fermières tous les risques de rejet du marché.

Une réglementation obligatoire apporterait de la certitude
Les développeurs d’usines souhaitent des certitudes en matière de réglementation. Le meilleur moyen d’y parvenir est de veiller à ce que toutes les plantes et semences génétiquement modifiées soient réglementées en tant que VCN. Les entreprises peuvent alors inclure le processus réglementaire dans leur planification.

Les entreprises impliquées dans la biotechnologie sont grandes et très rentables, et ont déjà la capacité de faire face aux réglementations de Santé Canada et de l’ACIA. Bien que certains partisans de l’édition génétique prétendent que le développement des plantes sera plus accessible aux petites entreprises, il est peu probable que cela se produise en raison de la nécessité de respecter des droits de brevet et des accords de licence stricts et complexes afin de commercialiser les produits. Si les produits génétiquement modifiés sont sûrs et bénéfiques et apportent des avantages significatifs, ils devraient être commercialisables et suffisamment rentables pour supporter le coût de la mise en conformité avec la réglementation. En exigeant que tous les produits génétiquement modifiés soient évalués par le gouvernement, les entreprises seront prévisibles et n’auront pas besoin d’évaluer si leur produit déclenche une réglementation.

L’édition de gènes n’est pas nécessairement bénéfique pour les fermières
L’édition de gènes n’est en fin de compte accessible qu’aux grandes multinationales de la semence et de l’agrochimie en raison de la dynamique des régimes de droits de propriété intellectuelle, de la position de monopole de ces entreprises sur le marché et des coûts liés au passage d’un génome édité du concept au produit final. Les entreprises qui prévoient de vendre des semences et des plantes génétiquement modifiées percevraient une « rente économique » de la part des fermières sur leurs produits en restreignant l’accès aux semences par le biais de droits de brevet, et grâce à leur capacité à utiliser les plantes et les semences génétiquement modifiées comme plate-forme pour vendre des produits connexes rentables tels que des herbicides, des fongicides et des formulations d’engrais brevetés. Cette dynamique crée une dépendance à l’égard d’un système d’achat de semences et d’intrants qui accélère le transfert de richesses des fermières vers les entreprises.

Le modèle commercial des plantes génétiquement modifiées n’a pas changé depuis l’introduction des premiers produits génétiquement modifiés tolérants aux herbicides. Ils ont permis à Monsanto de tirer des revenus non seulement des redevances annuelles sur les ventes de semences, mais aussi des ventes de l’herbicide de leur marque. Une fois que les caractères génétiquement modifiés et brevetés ont été introduits dans le canola, et à la suite de l’affaire de violation de brevet Percy Schmieser, l’accès aux semences conventionnelles s’est effondré et le coût des semences de canola a augmenté de façon spectaculaire, à tel point qu’aujourd’hui il n’y a pratiquement pas de semences de canola non génétiquement modifiées sur le marché. Un cadre réglementaire qui accélère la mise sur le marché des produits génétiquement modifiés risque d’avoir un résultat similaire, en augmentant le prix des semences et en réduisant considérablement l’accès aux semences non génétiquement modifiées pour un plus grand nombre de types de cultures.

Lorsque le génie génétique a été développé pour la première fois, les promesses d’une alimentation moins chère pour les consommateurs, d’une moindre utilisation de pesticides, d’une meilleure nutrition et de qualités agronomiques bénéfiques étaient souvent les mêmes que celles faites aujourd’hui par les promoteurs de la technologie d’édition de gènes. En réalité, le génie génétique n’a fourni que des caractéristiques limitées et l’adoption de cultures génétiquement modifiées a augmenté l’utilisation de pesticides, accéléré l’adaptation des ravageurs aux herbicides et aux insecticides, augmenté les coûts pour les fermières et n’a pas amélioré la saveur des aliments ni la nutrition. 100 % des cultures transgéniques commercialisées au Canada sont tolérantes aux herbicides et nombre d’entre elles sont également résistantes aux insectes. À l’échelle mondiale, la quasi-totalité des surfaces consacrées aux OGM sont plantées en maïs, en soja, en coton ou en canola et ne se trouvent que dans une poignée de pays. Pendant ce temps, au cours des 25 années qui ont suivi l’introduction des OGM, le Canada a perdu plus de 30 % de ses fermières, les coûts des agriculteurs ont augmenté et les revenus agricoles nets sont restés stagnants.

Les orientations réglementaires proposées profiteraient de manière disproportionnée aux grandes entreprises qui détiennent déjà des positions de monopole sur les marchés mondiaux des semences et des produits agrochimiques. En leur permettant de mettre rapidement sur le marché des VCN génétiquement modifiés, sans contrôle de sécurité de la part des pouvoirs publics ni divulgation obligatoire de la technologie utilisée, on renforcerait leur pouvoir de marché, ce qui leur permettrait d’exiger des redevances encore plus élevées et des prix plus importants pour les intrants agricoles.

Les décideurs politiques doivent également reconnaître que la sélection végétale conventionnelle est en mesure de fournir des avantages aux fermières, aux consommateurs et au système alimentaire qui égalent ou dépassent les promesses faites par les partisans de l’édition de gènes. En utilisant des méthodes traditionnelles, les sélectionneurs de plantes développent des variétés qui conservent les mécanismes de résilience conférés par des millénaires d’évolution tout en offrant une diversité de caractéristiques qui répondent bien à nos agro-écosystèmes changeants. L’utilisation de semences issues de techniques conventionnelles de sélection végétale préserve l’autonomie et la flexibilité des fermières, ce qui leur permet d’innover dans leurs exploitations en réponse aux problèmes spécifiques qu’elles rencontrent dans les diverses régions agricoles du Canada.

Le fermier est à la base du système alimentaire. Lorsque nous disposons d’une plus grande autonomie et que nous pouvons conserver les bénéfices des cultures que nous produisons dans nos fermes et dans nos communautés, nous pouvons contribuer davantage au bien-être de notre société. Lorsque nos revenus et notre autonomie sont de plus en plus limités par de puissantes entreprises, les fermières subissent un stress économique et psychologique de plus en plus important, tandis que la prospérité rurale et la cohésion sociale diminuent.

Le gouvernement a pour mission de protéger
La politique réglementaire fédérale du Canada énonce l’obligation du gouvernement de « veiller à ce que les réglementations se traduisent par les plus grands avantages globaux pour les générations actuelles et futures de Canadiens » et que, dans l’exercice de cette obligation, les ministères et les agences doivent veiller à protéger et à promouvoir l’intérêt public et à soutenir la bonne gouvernance, en protégeant la santé, la sécurité, la sûreté, le bien-être social et économique des Canadiens et l’environnement ; à ce que le processus réglementaire soit moderne, ouvert et transparent ; à ce que la prise de décision soit fondée sur des preuves ; et à ce que les réglementations soutiennent une économie équitable et compétitive.

Les orientations réglementaires proposées en ce qui concerne les plantes et les semences développées à l’aide de nouvelles technologies génétiques n’intègrent pas ces principes.

Décision nécessaire
Les ministres de la Santé et de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada sont en mesure de préserver ces importantes valeurs démocratiques en veillant à ce que Santé Canada et l’ACIA révisent les directives réglementaires proposées afin de garantir que toutes les plantes et semences génétiquement modifiées fassent l’objet d’une évaluation de sécurité par le gouvernement, qu’elles soient identifiées comme des plantes à caractères nouveaux et qu’elles soient obligatoirement répertoriées pour le public afin d’en assurer la transparence.

Références :

Règlement sur les aliments et drogues Titre 28, Nouveaux aliments https://laws-lois.justice.gc.ca/eng/regulations/c.r.c.,_c._870/page-54.html#h-574622

Règlement de la loi sur les semences, PARTIE V, Mise en circulation des semences https://laws-lois.justice.gc.ca/eng/regulations/c.r.c.,_c._1400/page-13.html#h-511799

Les effets involontaires causés par les techniques du nouveau génie génétique créent une nouvelle qualité de dangers et de risques, Christoph Then avec Lucy Sharratt www.testbiotech.org | www.cban.ca | Mars 2022 https://cban.ca/wp-content/uploads/New_GE_unintended_effects.pdf

Les effets involontaires causés par les techniques du nouveau génie génétique créent une nouvelle qualité de dangers et de risques, Christoph Then avec Lucy Sharratt www.testbiotech.org | www.cban.ca | Mars 2022 https://cban.ca/wp-content/uploads/New_GE_unintended_effects.pdf

Cibus est sur la bonne voie pour lancer SU Canola au Canada en 2017, Western Producer, 3 mars 2016. https://www.producer.com/news/cibus-is-on-track-to-launch-su-canola-into-canada-in-2017/

Cibus lance la nouvelle marque de semences Falco™, apportant changement et choix aux producteurs de canola nord-américains, service de distribution de communiqués de presse de Cision – Nouvelles fournies par Cibus, 31 janvier 2019, 17:11 ET https://www.newswire.ca/news-releases/cibus-launches-new-seed-brand-falco-tm-bringing-change-and-choice-to-north-american-canola-growers-873752619.html.

Le colza Cibus, l’origine mystérieuse de la mutation, par Eric Meunier, 29 septembre 2020, https://www.infogm.org/70547-cibus-canola-mysterious-origin-of-mutation?lang=fr

Le marché des aliments biologiques au Canada et son influence mondiale , Département de la recherche et de l’analyse économique d’EDC, novembre 2020. https://www.pivotandgrow.com/wp-content/uploads/2021/01/canada-organic-report-2020.pdf

Le Japon trouve des OGM dans des cargaisons de lin canadien, par l’équipe de Reuters, 16 novembre 2009 https://www.reuters.com/article/canada-us-trade-gmo-flax-idCATRE5AF10020091116

Marketing of corn hybrids not approved for use in Europe, déclaration commune de l’Ontario Agri Business Association et des Grain Farmers of Ontario, 21 avril 2020 https://www.oaba.on.ca/files/cornhybrids.pdf

Brevets sur l’édition du génome au Canada, fiche d’information du RCAB, mars 2022 https://cban.ca/wp-content/uploads/Patents-on-Genome-Editing-cban-March-2022.pdf

Enquête sur les OGM : Où se trouvent les cultures et les aliments génétiquement modifiés dans le monde ? Réseau canadien d’action sur les biotechnologies (RCAB), 2015. https://cban.ca/wp-content/uploads/where-in-the-world-gm-crops-foods.pdf

Recensement de l’agriculture, Nombre et superficie des exploitations agricoles et des terres agricoles par mode d’exploitation, données historiques du recensement de l’agriculture, 1921 à 2016

Directive du Cabinet sur la réglementation, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada. https://www.canada.ca/en/government/system/laws/developing-improving-federal-regulations/requirements-developing-managing-reviewing-regulations/guidelines-tools/cabinet-directive-regulation.html