Policy

Commentaires de l’UNF sur le projet de contrôle continu des pesticides par l’ARLA

La Nationale des Fermiers a soumis les commentaires suivants à Santé Canada concernant le projet de politique de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire sur la surveillance continue des pesticides.

La Nationale des Fermiers (UNF) a le plaisir de présenter ses commentaires sur le projet de politique de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) sur la surveillance continue des pesticides, PRO2024-01.[i]

L’UNF est une organisation agricole nationale non partisane, à adhésion directe et volontaire, qui regroupe des milliers de familles d’agriculteurs de tout le Canada. Fondée en 1969, l’UNF défend des politiques qui favorisent la dignité, la prospérité et l’avenir durable des fermières, des familles agricoles et de leurs communautés.

Les membres de l’UNF sont des fermiers qui doivent gérer les problèmes de ravageurs sur leurs exploitations afin de gagner leur vie. Nos membres représentent un large éventail de tailles et de types d’exploitations, de cultures, de bétail et de méthodes de production. Les positions de l’UNF en matière de politique publique reposent sur les connaissances, l’expérience, les valeurs et les aspirations de nos membres. En tant qu’organisation de fermiers, nous sommes parfaitement conscients de l’impact de l’utilisation des pesticides sur notre propre santé et sur celle de nos familles, de nos voisins et de nos clients. Nous sommes également très préoccupés par les effets de leur utilisation sur nos écosystèmes agricoles immédiats, en particulier sur les oiseaux, les zones humides, la vie du sol, les insectes utiles et la faune. Nous avons une vision à long terme et comprenons parfaitement que nos actions d’aujourd’hui affecteront les générations futures. Nous soutenons la recherche scientifique guidée par l’intérêt public et reconnaissons que la science est un processus d’apprentissage de notre monde. Notre soutien au principe de précaution découle de cette compréhension, car nombre de nos membres ont utilisé des produits initialement considérés comme sûrs, puis interdits lorsque des recherches plus approfondies ont révélé qu’ils causaient des dommages inacceptables. Notre soutien indéfectible à la science et à l’autorité réglementaire dans l’intérêt du public repose sur l’idée que c’est par le biais d’un gouvernement démocratique que les citoyens peuvent contrer l’intérêt personnel de puissantes entreprises.

En l’état actuel de la législation relative à la loi sur les produits antiparasitaires (LPA), la réévaluation des produits chimiques antiparasitaires doit avoir lieu tous les 15 ans depuis la dernière évaluation (section 16.2.a).[ii] Ces évaluations sont réalisées pour s’assurer que le niveau de risque est acceptable pour l’environnement et la santé humaine. Le ministre peut également lancer un processus de réévaluation à tout moment si les exigences en matière d’information ou les procédures utilisées pour l’évaluation des risques pour la santé ou l’environnement ont changé depuis la dernière décision (article 16), ou dans le cas de nouvelles études qui mettent en évidence des risques négatifs pour l’homme ou l’environnement allant au-delà de la définition acceptable du risque énoncée dans la loi. En outre, en vertu de l’article 12, la loi autorise le ministre à exiger des déclarants qu’ils fournissent des informations supplémentaires à des fins de contrôle, comme condition d’enregistrement.

Comme indiqué dans une précédente soumission à l’ARLA au sujet de l’examen ciblé de la LPA,[iii] l’UNF affirme que les pouvoirs conférés par la loi semblent suffisants pour autoriser un contrôle continu, mais qu’il est possible de les renforcer. L’UNF soutient également les propositions présentées dans le document « The Proposed Policy on Continuous Oversight of Pesticides » de l’ARLA.[iv] L’UNF estime que la mise en œuvre de la surveillance continue (CS) dans le processus d’évaluation de l’ARLA est conforme à nos valeurs en ce qui concerne le principe de précaution, tout en soutenant le mandat de l’APCP :

  • « Dans l’application de la présente loi, l’objectif premier du ministre est de prévenir les risques inacceptables pour les individus et l’environnement liés à l’utilisation de produits antiparasitaires.
    [v]
    et de
  • « s’efforcer de réduire au minimum les risques sanitaires et environnementaux liés aux produits phytosanitaires et encourager l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies innovantes et durables de lutte contre les organismes nuisibles en facilitant l’accès à des produits phytosanitaires présentant des risques moindres et en prenant d’autres mesures appropriées ; ».[vi]

Dans le passé, l’UNF a soumis des lettres sur les limites maximales de résidus de glyphosate, l’atrazine, le flupyradifurone, ainsi que l’imidaclopride, la clothianidine et le thiaméthoxame individuellement, et les néonicotinoïdes en général, concernant les préoccupations relatives aux effets de ces produits chimiques sur l’environnement, la biodiversité, les pollinisateurs et les cours d’eau.[vii] Les préoccupations générales de l’UNF concernant les effets de ces produits et d’autres produits chimiques de lutte contre les ravageurs seront mieux prises en compte et suivies grâce à la mise en œuvre du système CO.

Dans son soutien à la mise en œuvre de l’OC, l’UNF souhaite s’assurer que l’OC est un processus complémentaire qui soutient d’autres programmes d’examen, y compris les demandes d’enregistrement, de réévaluation et d’examen spécial. L’ARLA s’est inquiétée de la quantité de travail nécessaire pour réaliser toutes les évaluations à 15 ans. La capacité de l’ARLA à effectuer son travail ne modifie pas les risques réels des produits antiparasitaires pour la santé et l’environnement. La réévaluation après 15 ans devrait être maintenue comme norme minimale. Si le travail nécessaire à cette fin est onéreux, le ministre devrait prendre des mesures pour s’assurer que l’ARLA dispose des ressources dont elle a besoin pour mener à bien ces évaluations, dans l’intérêt du public et pour traiter les risques environnementaux.

L’UNF plaide également pour la transparence en ce qui concerne la collecte et l’examen des documents, en particulier ceux jugés importants pour la « rétention » dans le processus de triage. Dans le cadre de la surveillance continue, le processus de triage fait référence à l’examen de nouvelles informations sous CO, et les compare aux conclusions existantes de l’ARLA afin d’évaluer régulièrement si des changements appropriés doivent être apportés aux décisions. L’ARLA doit rendre publics les critères de conservation des informations scientifiques dans le cadre de son programme de surveillance. Il est également important de veiller à ce que des résumés en langage clair des preuves scientifiques retenues dans le cadre de la procédure d’autorisation de mise sur le marché soient mis à la disposition du public afin d’informer les fermières des risques potentiellement importants pour elles-mêmes, leurs travailleurs ou l’environnement. Ces résumés en langage clair doivent être suffisamment détaillés pour permettre au public de comprendre les implications de ces décisions.

Dans le cadre de la transparence prônée par l’UNF, nous considérons qu’il est crucial de divulguer la source et le financement des études prises en compte dans le processus de CO afin de réduire les préjugés et d’assurer un examen équitable des informations. L’UNF recommande que les études financées par le secteur des pesticides ou ses affiliés soient exclues du processus d’évaluation des risques. Le mandat de l’ARLA est de réglementer l’industrie des produits chimiques antiparasitaires ; l’utilisation de la science réalisée par l’industrie fait partie du mandat de l’ARLA qui est de protéger la santé des Canadiens et leur environnement.

L’UNF demande la mise en place de rapports continus sur les incidents liés aux pesticides et l’extension de la surveillance de l’eau par les pesticides dans le cadre de l’ARLA, qui sont inclus dans cette proposition de règlement. La mesure des effets cumulatifs des produits chimiques utilisés dans la lutte contre les ravageurs est importante pour la santé humaine et environnementale, ainsi que pour le développement durable. Dans le cadre du développement durable, nous promouvons la souveraineté alimentaire, qui est une approche holistique plaçant l’homme, l’alimentation et la nature au centre de la politique, en utilisant des stratégies de lutte intégrée contre les ravageurs qui seront mieux informées grâce à la mise en œuvre du processus de CO par l’ARLA.

L’UNF soutient la mise à jour de l’approche existante de l’ARLA visant à « vérifier les informations sur la chimie du produit pour les sources individuelles de matières actives de qualité technique afin qu’elles soient distinctes de la réévaluation et plus fréquentes ». Cela obligerait les fabricants à faire preuve de diligence raisonnable dans la fabrication et la distribution de leurs matériaux.

Enfin, l’UNF s’inquiète du soutien apporté aux nouvelles demandes d’homologation ou de modification de l’homologation d’un pesticide. Tout en utilisant le CO dans ce processus, l’ARLA doit s’assurer que les processus d’examen ne sont pas moins stricts pour les « amendements », en particulier lorsque les demandes concernent des catégories telles que « nouvelle utilisation importante » et « augmentation du taux d’application ».

Recommandations

  • Pour que le contrôle continu soit obligatoire, la LCP devrait être modifiée en changeant l’article 12(1) comme suit :

Le ministre exige, par un avis écrit, que tous les déclarants

(a) compiler des informations, effectuer des essais et suivre l’expérience acquise avec le produit antiparasitaire en vue d’obtenir des informations supplémentaires concernant ses effets sur la santé et la sécurité humaines ou sur l’environnement, ou concernant sa valeur ; et

(b) communiquer les informations supplémentaires au ministre dans le délai prescrit et sous la forme spécifiée dans l’avis.

  • Maintenir les exigences actuelles concernant l’obligation de réévaluation tous les 15 ans dans la LPA afin de garantir que chaque pesticide homologué soit réexaminé au moins une fois tous les 15 ans.
  • Transparence quant à la collecte et à l’examen des documents, en particulier ceux qui sont jugés importants pour la « conservation » dans le processus de triage.
  • Dans le cadre de la procédure d’autorisation de mise sur le marché, l’ARLA doit veiller à ce que les résumés des études « retenues » et importantes pour la procédure d’autorisation de mise sur le marché soient rédigés dans un langage clair, suffisamment détaillés et accessibles au public.
  • Lors de la compilation et de la conservation des informations aux fins de l’évaluation des risques, l’ARLA doit veiller à ce que la source et le financement des études considérées soient transparents et que les études financées par le secteur des pesticides ou ses filiales soient exclues.
  • En ce qui concerne les questions liées au soutien des nouvelles demandes d’homologation ou de modification de l’homologation d’un pesticide : parallèlement à l’utilisation du CO, l’ARLA doit veiller à ce que les processus d’examen ne soient pas moins stricts pour les « modifications » que pour les catégories telles que « nouvelle utilisation importante » et « augmentation de la dose d’application ».
  • Que le ministre veille à ce que l’ARLA ait la capacité de faire le travail qui lui est demandé en évaluant de manière exhaustive et continue les risques que les produits chimiques antiparasitaires présentent pour l’environnement et la santé humaine, dans l’intérêt du public.

 

Tout ceci est respectueusement soumis par

L’Union Nationale des Fermiers

février 2024

Références :


[i]
Agence de régulation de la lutte antiparasitaire. « Proposition de règlement PRO2024-01, projet de politique de surveillance continue des pesticides. Santé Canada, 3 janvier 2024. https://www.canada.ca/en/health-canada/services/consumer-product-safety/pesticides-pest-management/public/consultations/regulatory-proposals/2024/continuous-oversight-pesticides-policy/document.html.

[ii] Loi sur les produits antiparasitaires, S.C. 2002, c. 28 (2002). https://laws-lois.justice.gc.ca/eng/acts/p-9.01/.

[iii] « Soumission de l’UNF à l’examen ciblé de la loi sur les produits antiparasitaires ». Nationale des Fermiers, 30 juin 2022. https://www.nfu.ca/policy/nfu-submssion-to-targeted-review-of-the-pest-control-products-act/.

[iv] Agence de régulation de la lutte antiparasitaire. « Proposition de règlement PRO2024-01, projet de politique de surveillance continue des pesticides. Santé Canada, 3 janvier 2024.


[v]
Loi sur les produits antiparasitaires, S.C. 2002, c. 28 (2002).

[vi] Ibid.

[vii]  » Submission to PMRA on Glyphosate Proposed Maximum Residue Limit  » (Nationale des Fermiers, 15 juillet 2021), https://www.nfu.ca/policy/submission-to-pmra-on-glyphosate-proposed-maximum-residue-limit/ ; » Special Reviews of Clothianidin and Thiamethoxam Risk to Aquatic Invertebrates : UNF Submission to the Pesticide Management Regulatory Agency « , 13 novembre 2018, https://www.nfu.ca/policy/special-reviews-of-clothianidin-and-thiamethoxam-risk-to-aquatic-invertebrates/ ; » UNF Comments on Special Review of Atrazine  » (Union Nationale des Fermiers, 12 février 2016), https://www.nfu.ca/policy/nfu-comments-on-special-review-of-atrazine/ ; » UNF Submission on Flupyradifurone  » (Union Nationale des Fermiers, 3 novembre 2014), https://www.nfu.ca/policy/nfu-submission-on-flupyradifurone/ ; » UNF Submission – Action to Protect Bees from Exposure to Neonicotinoid Pesticides  » (Union Nationale des Fermiers, 10 décembre 2013), https://www.nfu.ca/policy/nfu-submission-action-to-protect-bees-from-exposure-to-neonicotinoid-pesticides/.