Lisez la transcription de la présentation de l’UNF à l’audition de la commission des finances.
Promouvoir l’intérêt public pour la prospérité des fermiers, des communautés et des générations
La Nationale des Fermiers (UNF) se réjouit de pouvoir contribuer aux consultations prébudgétaires de la commission des finances de la Chambre des communes en vue du budget 2019. L’UNF est une organisation agricole nationale non partisane, à adhésion directe et volontaire, composée de milliers de familles d’agriculteurs de tout le Canada qui produisent une grande variété de denrées, notamment des céréales, du bétail, des fruits et des légumes. L’UNF a été fondée en 1969, mais ses racines remontent à plus d’un siècle. En tant qu’organisation agricole générale, nos membres reflètent la diversité des systèmes de production, de la taille des exploitations et de la démographie des fermières à travers le pays. Nous promouvons la souveraineté alimentaire, qui est une approche holistique plaçant l’homme, l’alimentation et la nature au centre de la politique, et qui fait du contrôle démocratique du système alimentaire sa priorité.
L’UNF promeut des politiques qui maintiendront les exploitations agricoles familiales en tant que principaux producteurs de denrées alimentaires au Canada. L’UNF estime que l’agriculture doit être économiquement, socialement et écologiquement durable et que la production alimentaire doit permettre d’offrir à la population des aliments sains, d’enrichir les sols, d’embellir les paysages, de créer des emplois pour les non-agriculteurs, d’assurer la prospérité des communautés rurales et de préserver la biodiversité des écosystèmes naturels. L’UNF est un chef de file dans la défense des intérêts des exploitations agricoles familiales du Canada, dans l’analyse de la crise du revenu agricole et dans la proposition de solutions abordables, équilibrées et novatrices qui profitent à tous les citoyens. Les positions politiques de l’UNF sont élaborées dans le cadre d’un processus démocratique par le biais de débats et de votes sur des résolutions lors des conventions régionales et nationales, conformément à nos statuts.
Le budget 2019 du Canada offre la possibilité de financer d’importantes initiatives politiques fédérales visant à renforcer le rôle de l’agriculture en tant que moteur économique en veillant à ce que les revenus agricoles et la richesse créée par les agriculteurs soient disponibles pour les Canadiens et leurs communautés. Dans notre mémoire, nous décrivons comment le gouvernement fédéral peut réorganiser les programmes et les mesures fiscales pour mieux soutenir la multifonctionnalité tout en favorisant la production intérieure et en inversant la tendance à la baisse du nombre de fermières.
Nous commençons par recommander au Canada de se fixer l’objectif ambitieux de remplacer un tiers des importations alimentaires du pays par une production nationale. Cela permettrait de réinjecter 15 milliards de dollars de denrées alimentaires dans notre économie afin de favoriser la diversification économique et la revitalisation des zones rurales ; cela répondrait également au souhait des consommateurs de disposer d’aliments plus sains produits par les fermières et fermiers canadiens.
L’UNF a exhorté le budget 2019 à sauvegarder notre système de gestion de l’offre, non seulement pour les fermiers individuels concernés, mais aussi pour leurs communautés, les consommateurs, les contribuables et l’ensemble de l’économie canadienne. Dans le cadre de la gestion de l’offre, les fermières ont la capacité d’investir dans leurs exploitations tout en produisant la bonne quantité et la bonne qualité de produits au bon moment. Il a prouvé sa valeur tant pour les fermiers que pour les consommateurs et le trésor public. La viabilité continue de notre système de gestion de l’offre permettra d’éviter les dépenses liées aux subventions massives nécessaires dans les pays où la production laitière a été déréglementée et dans les secteurs qui ne disposent pas d’institutions de commercialisation ordonnées.
Le budget 2019 devrait agir de manière décisive pour inverser la perte des fermières 2025 en finançant le cadre institutionnel nécessaire pour augmenter et stabiliser les revenus des fermières d’aujourd’hui, les aider à continuer et faire de l’agriculture un choix de carrière viable pour les jeunes.
L’UNF recommande la création d’un fonds pour l’enseignement agricole afin d’octroyer des bourses aux jeunes et aux nouveaux fermiers. Elle soutiendrait la participation aux programmes d’apprentissage agricole et réduirait les coûts de la formation autodirigée des fermières offerte en dehors du système d’éducation formel.
Le Canada a également besoin d’un plan d’assurance-revenu pour les fermiers débutants afin de les aider à s’établir et de favoriser leur réussite à long terme. Un programme d’épargne-retraite ou un régime de pension spécialement conçu pour les fermières leur permettrait de moins dépendre de la vente de leurs terres à des prix élevés pour financer leur retraite.
L’UNF recommande la mise en place de fiducies de quotas et de fiducies foncières pour financer le transfert intergénérationnel d’actifs productifs. Les fermiers retraités qui transfèrent des quotas ou des terres au Trust verront leur valeur exonérée d’impôt et auront droit à une rente basée sur la valeur productive des quotas ou des terres transférés. Les nouveaux fermiers éligibles demanderaient à utiliser les quotas ou les terres du Trust en échange d’une partie des revenus tirés de leur utilisation et d’un engagement à poursuivre la production pendant une période minimale.
L’UNF recommande la création d’un conseil de subvention de la main-d’œuvre agricole afin de promouvoir les bons emplois dans les communautés rurales et de régénérer une main-d’œuvre agricole qualifiée. Ce Conseil distribuerait l’aide directement aux fermières dont la demande serait acceptée. Ces subventions soutiendront l’embauche, la formation et le maintien des travailleurs agricoles. Ce Conseil aiderait les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre à mieux répondre à la demande des consommateurs en denrées alimentaires produites par les exploitations agricoles canadiennes.
L’UNF recommande l’adoption de mesures fiscales et le financement de programmes visant à promouvoir une plus grande diversité des exploitations agricoles par l’allongement des rotations de cultures, le pâturage planifié du bétail, la réduction des intrants, la reconstitution des sols, la conservation des zones humides et la transformation à la ferme. Les avantages de l’adaptation au climat qui en résulteront stabiliseront les revenus agricoles et réduiront les indemnités d’assurance, ce qui diminuera le coût net de ces initiatives budgétaires tout en augmentant la prospérité rurale.
L’UNF recommande de soutenir les entreprises communautaires d’emballage, de transformation, de stockage et de distribution qui servent les économies alimentaires locales et régionales. En finançant cette infrastructure nécessaire, le budget 2019 peut combler les écarts entre les fermières et les consommateurs à la recherche d’aliments locaux et régionaux en augmentant la capacité de notre économie à fournir aux Canadiens des aliments cultivés et élevés au Canada tout au long de l’année.
L’UNF recommande que le budget de la Commission canadienne des grains (CCG) soit ramené à son niveau d’avant 2012, ajusté en fonction de l’inflation. Le financement de base est nécessaire pour maintenir la capacité de la CCG à faire respecter les normes de qualité des grains, protégeant ainsi la réputation internationale et les marchés d’exportation du Canada. Le budget 2019 devrait rétablir l’inspection à l’arrivée et mettre en place une nouvelle agence de réception des voitures de producteurs sous l’autorité de la CCG. L’expédition de wagons de producteurs fournit une discipline importante sur le pouvoir des chemins de fer et des compagnies céréalières. Ces mesures sont nécessaires pour garantir que le droit des fermières de charger et d’expédier des wagons ne devienne pas un droit vide. Le maintien de la solidité de la CCG est nécessaire pour que nos fermiers céréaliers conservent l’avantage concurrentiel que nous avons acquis grâce à notre système robuste de contrôle de la qualité à l’échelle de l’ensemble du système.
L’UNF exhorte également le budget 2019 à financer les travaux nécessaires à la mise en place d’une agence à guichet unique à l’échelle nationale, dirigée par les fermiers, pour vendre le blé et l’orge destinés à l’exportation et le blé destiné à la consommation humaine domestique. La destruction de la Commission canadienne du blé (CCB) en 2012 a causé de multiples préjudices à l’économie canadienne. Plus de 3 milliards de dollars par an ne sont plus versés aux communautés des Prairies parce que les sociétés céréalières privées peuvent désormais sous-payer les fermières pour leurs céréales. Auparavant, la CCB payait aux fermiers la valeur totale de leur grain, moins les frais de vente. Les goulets d’étranglement dans les transports et les inefficacités dues à la perte de la coordination des expéditions par la CCB sont des coûts qui sont en fin de compte supportés par les fermiers, des pertes qui se traduisent par moins d’emplois et moins de petites entreprises dans les communautés des prairies.
Les actifs matériels de la CCB ont été remis au partenariat Bunge-SALIC, Global Agriculture (G3) en juillet 2015. SALIC, une entreprise d’État du Royaume d’Arabie Saoudite, détient désormais 75 % de G3. L’UNF a demandé à deux reprises à l’auditeur général de réaliser un audit public de la CCB alors qu’elle se préparait à la transition vers la propriété privée. Nous demandons instamment à la commission des finances de donner à l’auditeur général les instructions nécessaires pour qu’il puisse apporter les réponses dont les fermiers canadiens et les autres contribuables ont besoin.
L’UNF recommande la création d’agences régionales de vente de viande bovine et porcine à guichet unique pour la Colombie-Britannique, les Prairies, l’Ontario et les régions du Québec et de l’Atlantique, afin d’éviter les coûts élevés et les effets destructeurs de l’exposition à la volatilité des marchés d’exportation et aux conditions politiques extérieures. Par exemple, les producteurs de porcs canadiens reçoivent un prix fixé par les États-Unis et sont donc contraints d’accepter un prix inférieur en raison de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine. Nos conditionneurs de viande bovine étrangers importent du bétail pour maintenir les prix de la viande bovine canadienne à un niveau bas, malgré la diminution de notre cheptel. Le budget 2019 devrait prévoir un financement pluriannuel pour soutenir la coordination des abattoirs inspectés par les provinces et la transition de la capacité de transformation pour répondre aux besoins de la population régionale, et pour soutenir la transition équitable des secteurs du bœuf et du porc vers le système de guichet unique. Les opérations de l’agence à guichet unique sont autofinancées, contrairement aux secteurs du bœuf et du porc actuellement exposés aux marchés d’exportation, qui dépendent tous deux fortement des programmes de protection sociale du Canada.
L’UNF recommande que le budget 2019 prenne un engagement majeur pour réduire considérablement les émissions de GES et promouvoir la rentabilité des exploitations agricoles en réorientant les fonds alloués aux stations de recherche d’AAC vers le développement et la promotion de stratégies de production à faibles intrants axées sur la réduction de l’utilisation d’engrais azotés synthétiques, d’herbicides et d’insecticides. Pour mettre cette recherche en pratique, le budget 2019 devrait établir un programme national efficace de vulgarisation agricole afin d’aider les fermières à apprendre comment contribuer à atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre du Canada.
Le budget 2019 devrait également financer des programmes visant à aider les exploitations agricoles confrontées à des problèmes à long terme liés au climat. Par exemple, les exploitations agricoles qui subissent des inondations persistantes peuvent être amenées à déplacer les bâtiments et les corrals sur des terrains plus élevés. L’investissement dans des stratégies d’atténuation des GES et d’adaptation au climat contribuera également à réduire les demandes futures de programmes de protection sociale en aidant les exploitations agricoles à devenir plus résilientes.
L’UNF soutient la recherche financée par des fonds publics dans l’intérêt du public, avec des résultats librement disponibles pour le bénéfice du public. C’est pourquoi nous appelons à une réévaluation des programmes de subvention qui exigent des chercheurs qu’ils trouvent des fonds de contrepartie auprès de partenaires du secteur privé. La concentration de la propriété dans l’agro-industrie signifie que quelques grandes entreprises sont de plus en plus en mesure d’orienter le programme de recherche agricole du Canada pour servir leurs propres intérêts. En fournissant des « 50-cent dollars » aux universités, ces entreprises peuvent commander d’importantes ressources publiques, y compris des professeurs, des étudiants diplômés, des laboratoires universitaires, des équipements et des parcelles de recherche. Les résultats de leurs recherches sont souvent privatisés par le biais de droits de propriété intellectuelle ou de développement de produits commerciaux. La recherche de nature non commerciale est donc privée de fonds. Les questions non commerciales intéressantes ne sont pas étudiées et les innovations qui peuvent être appliquées grâce au partage des connaissances plutôt qu’à l’achat d’intrants ne sont pas développées. L’UNF recommande de corriger ce déséquilibre. Les chercheurs qui étudient des problèmes non commerciaux ont besoin d’un accès fiable à des subventions financées à 100 % par des fonds publics. Nous recommandons également que le budget 2019 ajoute un supplément pour la recherche d’intérêt public aux fonds fournis par les sociétés qui s’associent aux universités et à AAC. Les recettes de cette surtaxe seraient alors affectées à la recherche d’intérêt public non commerciale (par exemple, l’amélioration des techniques de gestion des pâturages, la conception d’installations de stockage permettant de réduire les déchets alimentaires, etc. Les fonds devraient également être utilisés pour promouvoir un « bien commun de la recherche » afin de mettre les innovations à la disposition du grand public dans le domaine public ou sous des licences « copyleft » qui empêchent les recherches futures d’être entravées par des restrictions des droits de propriété intellectuelle.
L’UNF recommande d’augmenter le financement de l’Agence de réglementation de la gestion des pesticides (ARLA) afin qu’elle dispose des ressources et des capacités nécessaires pour accomplir son travail dans l’intérêt du public. L’ARLA est confrontée à une lourde charge de travail dans les années à venir, car il est prévu de réévaluer de nombreux anciens pesticides à l’aide d’informations scientifiques actualisées, afin de s’assurer qu’ils ne présentent pas de risques inacceptables pour les personnes et l’environnement. L’UNF recommande également d’allouer des fonds à la recherche et à l’éducation afin de promouvoir la lutte intégrée contre les ravageurs, les pratiques agronomiques, les contrôles mécaniques et biologiques et les efforts de sélection végétale traditionnelle pour aider les fermières à abandonner l’utilisation de produits antiparasitaires qui seront progressivement supprimés afin de protéger l’environnement et la santé humaine. Une surtaxe ou un prélèvement sur toutes les ventes de produits antiparasitaires pourrait être mis en œuvre pour fournir des recettes supplémentaires à ces fins.
Le budget 2019 devrait prévoir un financement suffisant et substantiel pour mettre en œuvre un régime national d’assurance-médicaments qui offre une couverture à tous les résidents du Canada dans des conditions égales, qui est administré comme un système public à payeur unique intégré à l’assurance-maladie, qui offre un accès aux médicaments couverts sans barrières financières ou autres obstacles, qui couvre autant de médicaments que ceux jugés sûrs et efficaces par des preuves scientifiques et sur la base du meilleur rapport qualité-prix, sans être influencé par des pressions politiques et des campagnes de marketing, et qui offre une couverture continue et cohérente aux résidents qui se déplacent à l’intérieur du Canada.
Tout ceci est respectueusement soumis par
L’Union Nationale des Fermiers
1er octobre 2018