Aller à la racine : Reconnecter les consommateurs et les fermières

par Alana Krug-MacLeod, 16 ans, Saskatoon, Saskatchewan

AlanaMon été s’est terminé par un voyage à une convergence de permaculture près de Rocky Mountain House, en Alberta. C’est là que j’ai découvert des approches novatrices de l’agriculture et des personnes qui s’en occupent. J’avais déjà visité une forêt nourricière et un jardin de permaculture à Craik Ecovillage ; j’avais passé la nuit dans une ferme de permaculture avec du bétail dans une région rurale de la Saskatchewan ; et j’avais participé à un permablitz dans une arrière-cour à Saskatoon. Ces choix ont été motivés par le fait que je suis de plus en plus conscient que la nourriture que nous mangeons et la manière dont elle est cultivée sont essentielles non seulement pour les personnes, mais aussi pour le bien-être de notre environnement.

Les gouvernements peuvent jouer un rôle dans l’éveil des citoyens à cette prise de conscience critique de l’importance des questions liées à l’alimentation, et ce serait le meilleur moyen d’aider les futures fermières à réussir. Une bonne politique aux trois niveaux de gouvernement serait nécessaire pour permettre cette prise de conscience alimentaire.

Il est essentiel de mettre en relation les consommateurs et les fermières pour sensibiliser la communauté aux problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs, et l’un des moyens d’y parvenir serait de soutenir les producteurs locaux. En achetant des denrées alimentaires aux fermières de leur région, les consommateurs nouent des relations avec les producteurs, apprennent comment leur nourriture est produite et font circuler l’argent dans la communauté locale. Cette approche permet de réduire les kilomètres de transport des denrées alimentaires, ce qui est bénéfique pour l’environnement. Pour atteindre cet objectif, les collectivités locales pourraient soutenir les points de vente tels que les marchés fermiers en construisant des infrastructures.

L’argent des impôts investi reviendrait à la communauté car les fermières dépensent de l’argent localement, ce qui en fait une option financièrement viable. Ces approches ne constituent qu’une étape vers l’achat par les consommateurs de produits agricoles cultivés localement, car seule une petite partie des produits agricoles pourrait être vendue de cette manière. Des mécanismes de promotion de la consommation alimentaire locale devraient être mis au point pour que les producteurs travaillant dans un rayon restreint autour d’une communauté donnée puissent satisfaire la majorité des besoins alimentaires.

Les villes et les administrations municipales pourraient soutenir une approche encore plus locale de la production alimentaire. Plutôt que d’entraîner une concurrence avec les fermières locales, cette démarche contribuerait en fait à soutenir les fermières, car une fois que les gens auraient mis la main à la pâte pour cultiver des aliments, ils se rendraient compte de la quantité de travail nécessaire, comprendraient mieux certains des coûts et des difficultés auxquels les fermières sont confrontées et accorderaient une plus grande valeur aux fermières. Reconnecter les gens avec la source de leur alimentation et leur permettre de préparer des repas avec des aliments frais et non transformés profiterait aux fermières et aux consommateurs plutôt qu’aux transformateurs et aux transporteurs de denrées alimentaires – ce qui permettrait de restituer aux fermières un pourcentage plus élevé du coût des denrées alimentaires. Elle réduirait également l’empreinte écologique des consommateurs de denrées alimentaires, ce qui serait bénéfique pour l’environnement. Les collectivités locales pourraient faciliter ce changement en adoptant des règlements autorisant l’utilisation de terrains vacants pour la production alimentaire et en approuvant une législation autorisant certains élevages dans les arrière-cours. Les collectivités locales pourraient continuer à soutenir les jardins communautaires et à rechercher les espaces verts inutilisés pour les affecter à la production alimentaire. En outre, ils peuvent planter des arbres et des arbustes fruitiers et à noix dans les espaces publics – parcs, boulevards et le long des rues. L’intensification de la production alimentaire dans les villes permettrait de sensibiliser les consommateurs aux aliments locaux et de soutenir les fermières et fermiers locaux.

Le gouvernement provincial pourrait encourager la consommation d’aliments locaux dans deux domaines principaux de sa compétence : l’éducation et la santé. L’utilisation d’aliments nutritifs produits localement réduirait les dépenses médicales de la société en améliorant la santé de la population en général. L’établissement de contrats avec les fermiers locaux pour la fourniture des aliments utilisés dans les établissements médicaux serait bénéfique pour les fermiers, les patients et les contribuables. De même, étant donné que les gouvernements provinciaux régissent l’éducation, chaque province pourrait mettre en place des programmes de repas intégrés dans les écoles. Ces programmes consisteraient à cultiver des aliments sur le terrain de l’école ou à acheter des aliments frais à des fermières locales. Apprendre à produire des aliments, faire de l’exercice physique dans le cadre d’un travail productif et utile, et s’entraîner à préparer des repas avec des produits cultivés localement, voilà qui préparerait les élèves à valoriser l’agriculture dès leur plus jeune âge. Par le biais des systèmes d’éducation et de soins de santé, les gouvernements provinciaux pourraient jouer un rôle important pour garantir la viabilité de l’agriculture pour les générations futures.

Pour que la législation et les initiatives liées à l’alimentation au niveau local soient efficaces, certaines décisions politiques majeures au niveau fédéral devraient être réexaminées. Pendant des décennies, l’accent a été mis sur l’établissement d’accords de libre-échange et sur la conclusion d’accords commerciaux avec les pays. Toutefois, certaines formes de protectionnisme devraient être réaffirmées si le Canada veut reprendre le contrôle de ses politiques de production et de consommation alimentaires. La disparition des monopoles de vente détenus par les fermières, capables de concurrencer les quelques puissantes multinationales qui monopolisent les marchés, limite l’activité agricole pour les générations futures. De nouvelles solutions sont nécessaires, qui permettent aux fermières de contrôler collectivement où leurs produits sont vendus et à quel prix. Si les fermières veulent rester sur leurs terres et en tirer un revenu viable, elles devront être en mesure de les transmettre de génération en génération. Il est essentiel de veiller à ce que cela ne soit pas financièrement onéreux. Les programmes tels que les banques de terres, bien que controversés, permettent aux nouveaux fermiers de se lancer dans la production alimentaire sans prendre le risque financier nécessaire à l’achat de leurs propres terres. La création de fiducies foncières garantissant que les terres agricoles restent disponibles pour la production alimentaire est un autre mécanisme qui garantirait la réussite des futures générations de fermières. Toute approche visant à contrer la tendance à l’agrandissement des exploitations et à la propriété foncière étrangère et absente est un moyen de soutenir directement les fermières. Un plus grand nombre d’exploitations agricoles et de petites exploitations appartenant à la population locale permettrait de créer des communautés fortes et de donner une voix collective aux fermières. Ce sont là des mesures essentielles qui doivent être prises au niveau fédéral pour soutenir les fermières.

Tous les niveaux de gouvernement ont un rôle à jouer dans le soutien à la prochaine génération de fermiers et la responsabilité d’améliorer notre compréhension de la valeur et de l’importance de la gestion de l’approvisionnement alimentaire de notre pays. L’instauration d’une culture qui valorise l’alimentation et l’agriculture et dans laquelle les citoyens connaissent et apprécient le coût réel de la production locale d’aliments sains et nutritifs conduirait à un monde où l’agriculture serait valorisée et où les fermières gagneraient des revenus viables.

Ressources

L’agriculture locale et durable est notre meilleur espoir de nourrir le monde

Un examen des fonds fiduciaires pour les terres agricoles Les communautés qui soutiennent les terres agricoles, l’agriculture et les fermiers

Politique en matière d’agriculture durable

Soumission au groupe de travail sur l’aménagement du territoire de l’Île-du-Prince-Édouard