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L’UNF-O publie un nouveau rapport :

« Recadrer la crise de la main-d’œuvre agricole en Ontario

Résumé

Les préoccupations croissantes concernant la « crise de la main-d’œuvre agricole » ou la « pénurie de main-d’œuvre agricole » n’ont pas pris en compte les conditions de travail particulières des petites et moyennes exploitations. Il est nécessaire de recadrer le débat sur la crise de la main-d’œuvre agricole afin de mieux comprendre comment les pénuries de main-d’œuvre sont ressenties et comprises dans les petites exploitations par rapport aux grandes entreprises agroalimentaires. Les voix des agriculteurs qui s’engagent à créer des systèmes alimentaires locaux, justes et durables sont trop souvent étouffées par les lobbyistes des entreprises.

En avril 2020, l’UNF-O s’est lancée dans un projet sur la main-d’œuvre agricole afin d’étudier les problèmes de main-d’œuvre agricole dans les petites et moyennes exploitations. Le rapport et les recommandations qui suivent sont basés sur une étude à méthodes mixtes comprenant une enquête auprès de 772 exploitants et travailleurs agricoles, des consultations avec les parties prenantes, des entretiens informels, des discussions de groupe en ligne et une analyse documentaire.

L’étude a révélé que les petites et moyennes exploitations sont de solides créateurs d’emplois agricoles. En fait, les exploitations de moins de 70 acres étaient plus susceptibles d’employer des Ontariens que leurs homologues de plus grande taille. Les travailleurs étrangers temporaires ne représentent que 8,5 % de la main-d’œuvre des petites et moyennes exploitations, contre 30 % pour l’ensemble du secteur. De nombreuses fermes interrogées dispensent des formations agricoles approfondies et sont des pépinières de connaissances pour la prochaine génération de fermières. Il y a beaucoup de travail dans ces exploitations, et beaucoup de gens sont attirés par le travail et le mode de vie rural.

Il y a cependant une pénurie d’emplois agricoles rémunérés, ce qui a entraîné une pénurie de travailleurs qualifiés et expérimentés.

Les raisons de la pénurie d’emplois agricoles rémunérés sont complexes. En raison de la crise des revenus agricoles, les petits et moyens producteurs ne disposent plus que d’un revenu net insuffisant pour se payer eux-mêmes, sans parler de leur main-d’œuvre essentielle. Après trente ans d’accords de libre-échange, le système alimentaire mondial capitaliste a fait baisser la valeur marchande de nombreux produits agricoles et, en fin de compte, a fixé le plancher des salaires des travailleurs agricoles les moins bien payés au monde. Les exemptions partielles prévues par le droit du travail de l’Ontario ont exclu les travailleurs agricoles des lois sur le salaire minimum et d’autres protections essentielles en matière de travail. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que de nombreux Ontariens soient réticents à effectuer des travaux agricoles hautement qualifiés, physiquement exigeants et faiblement rémunérés.

Sans salaires/revenus décents, il est peu probable que nous attirions suffisamment d’Ontariens désireux d’acquérir les compétences et de consacrer leur vie à la production agricole. à la production agricole.

Si nous voulons ouvrir la voie à des emplois rémunérateurs et augmenter les revenus agricoles dans l’agriculture canadienne sans droits de douane ni autres mécanismes de protection du marché, il faut que les pouvoirs publics apportent un soutien encore plus important. Il est urgent de mettre en place des aides à la main-d’œuvre agricole et des subventions salariales, d’améliorer l’accès à l’assurance-emploi et, idéalement, d’instaurer un revenu de base afin de garantir que les travailleurs agricoles et les exploitants reçoivent un revenu annuel décent, indépendamment de leur salaire horaire, des revenus de l’exploitation ou de la durée de la saison.

Des valeurs communes et une culture d’équipe positive dans les petites et moyennes exploitations agricoles de l’Ontario ont continué à attirer les aspirants fermiers. Mais il est peu probable qu’ils restent ou qu’ils deviennent la prochaine génération d’exploitants agricoles si nous ne nous attaquons pas à la précarité financière de ceux qui cultivent notre nourriture.

Les recommandations issues du projet sur la main-d’œuvre agricole de l’UNF-O sont regroupées en deux sections. Le premier, intitulé « Renforcer les capacités des employeurs et des travailleurs agricoles », propose des mesures que les fermières, les organisations agricoles, les groupes communautaires, les consommateurs et les autres parties prenantes peuvent prendre pour soutenir et développer la main-d’œuvre agricole de l’Ontario.

La seconde, intitulée « Soutien et législation au niveau municipal, provincial et/ou fédéral », contient des recommandations politiques clés destinées aux élus et à tous les niveaux de gouvernement. La mise en œuvre de ces politiques soutiendra le travail essentiel des petites et moyennes exploitations agricoles de l’Ontario.

Vous trouverez ci-dessous une liste complète des recommandations.

Contact

Si vous avez des questions ou si vous souhaitez en savoir plus sur ce rapport, veuillez contacter Dave Thompson à l’adresse david@nfuontario.ca.

Cliquez ici pour lire le rapport : Reframing-the-Farm-Labour-Crisis-UNF-O-Farm-Labour-Study_compressed (en anglais)
Recommandations
Renforcer les capacités des employeurs et des travailleurs agricoles
  • Fournir une formation en ressources humaines aux exploitants agricoles : Bien qu’ils soient experts en matière de production alimentaire et de gestion du bétail, les petits et moyens exploitants agricoles n’ont souvent ni le temps ni les connaissances nécessaires pour embaucher, gérer et conserver les travailleurs de manière adéquate. Proposer aux exploitants agricoles une formation spécifique sur le travail avec le personnel et fournir des modèles et des ressources adaptés aux besoins des petites et moyennes exploitations agricoles serait bénéfique pour les exploitants et les travailleurs en favorisant des lieux de travail sains, transparents, responsables et sûrs.
  • Promouvoir les meilleures pratiques pour les employeurs agricoles : Une majorité d’exploitants et de travailleurs agricoles ont souligné que l’adéquation entre les valeurs de l’exploitation et un bon style de gestion ou une culture d’équipe crée un environnement de travail positif et attrayant. Les repas à la ferme et les produits gratuits ou à prix réduit sont également des facteurs d’attraction importants pour les nouveaux travailleurs et ceux qui reviennent. Bien que peu d’exploitations agricoles proposent des participations aux bénéfices ou un régime complémentaire de soins de santé et de soins dentaires, les travailleurs ont déclaré que ces pratiques joueraient un rôle dans la poursuite d’une carrière agricole à long terme. La promotion de ces pratiques et d’autres « meilleures pratiques » et l’encouragement de leur adoption dans d’autres fermes aideront les petites et moyennes fermières à attirer les Ontariens qui sont motivés par des facteurs autres que la rémunération financière.
  • Financer des programmes de formation pour les nouveaux fermiers et les travailleurs agricoles : Plus de 70 % des travailleurs agricoles ont acquis leurs compétences agricoles dans le cadre d’une formation à la ferme. Les offres de formation et d’éducation sont particulièrement répandues dans les petites et moyennes exploitations rurales et dans les exploitations communautaires urbaines à but non lucratif. De nouveaux programmes tels que le programme de formation en ligne des nouveaux agriculteurs de la ferme Ignatius manquent actuellement d’un financement stable alors qu’ils répondent à un réel besoin du secteur agricole.
  • Soutenez les initiatives coopératives : Moins de 5 % des exploitations agricoles interrogées sont des coopératives, mais près de 13 % d’entre elles envisageraient d’en créer une. Plus de 48 % des travailleurs sont intéressés par les possibilités d’agriculture coopérative. Compte tenu des contraintes financières qui pèsent sur les exploitants et le personnel agricoles, il est recommandé que les organisations agricoles travaillent en étroite collaboration avec les coopératives agricoles et alimentaires locales (LFFC) pour soutenir les fermiers qui souhaitent lancer des modèles coopératifs ou effectuer une transition vers ces modèles.
  • Améliorer la protection et l’accès aux terres agricoles : La nécessité de protéger les terres agricoles contre le développement et d’empêcher les petites et moyennes exploitations d’être absorbées par les grandes entreprises agroalimentaires est cruciale pour résoudre les crises du revenu agricole et du salaire de subsistance de la main-d’œuvre agricole. Le remboursement des hypothèques et des dettes constitue un obstacle à l’embauche pour les fermières. Plus de 64 % des travailleurs agricoles ont déclaré que la flambée des prix des terres les empêchait d’y accéder. Les Noirs, les autochtones et les personnes de couleur (PANDC) sont confrontés à des obstacles supplémentaires pour accéder à la terre et parvenir à la souveraineté alimentaire de leurs communautés. Le fait de s’allier à la Fiducie pour les terres agricoles de l’Ontario et de créer des possibilités de liaison et de partage des terres ainsi que de succession entre les fermiers qui prennent leur retraite et ceux qui aspirent à le faire contribuera à protéger les terres agricoles et à créer des voies permettant aux travailleurs agricoles expérimentés de devenir la prochaine génération de fermiers.
  • Syndiquer tous les travailleurs agricoles en vertu de la loi sur la protection des employés agricoles (LPEA) : Près des trois quarts des exploitants agricoles sont favorables à l’octroi du droit de se syndiquer aux travailleurs agricoles. Bien que la LPEA n’accorde aux travailleurs que le droit de s’associer, il est recommandé aux employeurs agricoles favorables aux syndicats d’encourager leur personnel à s’associer dans le cadre de la LPEA et aux travailleurs agricoles des petites et moyennes exploitations de nouer des relations avec leurs collègues de l’agriculture d’entreprise et de collaborer avec les TUAC et les groupes de défense des droits des migrants afin de renforcer leur force collective. Une voix unifiée pour les travailleurs renforcera la capacité à promouvoir des intérêts communs en matière de salaires équitables, d’alimentation locale, de sécurité alimentaire, de gestion des terres et de moyens de subsistance sains pour tous.
  • Sensibiliser les consommateurs à la sous-évaluation de la main-d’œuvre agricole : Pendant la pandémie, de nombreux consommateurs ontariens ont réalisé que le travail agricole était un travail qualifié essentiel. Près de deux tiers des exploitants et des travailleurs agricoles souhaiteraient que les responsables politiques, les organisations agricoles et les autres parties prenantes soutiennent un mouvement populaire en faveur de prix alimentaires équitables afin d’atténuer l’insécurité des revenus agricoles et les bas salaires.
Soutien et législation au niveau municipal, provincial et/ou fédéral
  • Augmenter et améliorer les subventions à la main-d’œuvre agricole pour les petites et moyennes exploitations agricoles : Environ 40 % des exploitants et des travailleurs agricoles pensent que le gouvernement devrait donner la priorité à l’augmentation et à l’élargissement de l’accès aux aides et subventions à la main-d’œuvre agricole. Nombreux sont ceux qui ont demandé l’extension des critères d’âge et des durées de contrat pour les emplois d’été au Canada (EÉC) et le Programme pour l’emploi et les compétences des jeunes (PECJ). Certains répondants souhaitaient également que CSJ et le YESP offrent un  » salaire de subsistance  » et non seulement le minimum de l’Ontario.
  • Révision des programmes de travailleurs étrangers temporaires : Plus de deux tiers des exploitants agricoles interrogés sont d’accord avec les mouvements de migrants sur la nécessité d’un statut permanent pour les travailleurs migrants. Il existe un fort contingent de fermières qui souhaitent que divers droits du travail soient étendus aux TET.
  • Promulguer des congés de maladie payés universels : Les perturbations du travail dues à la pandémie de COVID-19 ont clairement fait comprendre aux exploitants agricoles et aux travailleurs la nécessité d’instaurer des congés de maladie payés permanents pour tous les travailleurs, y compris les exploitants agricoles.
  • Offrir un revenu de base (RB) : Près de 37 % des exploitants agricoles et 67 % des ouvriers agricoles considèrent le revenu de base comme une priorité absolue pour protéger les ouvriers agricoles et les exploitants de l’insécurité financière. En l’absence de mécanismes de protection du marché, une BI serait l’un des moyens les plus efficaces de garantir un revenu annuel décent, indépendamment des salaires horaires, des revenus agricoles ou de la saisonnalité de la production.
  • Améliorer l’accès à l’assurance-emploi (AE) : Les travailleurs agricoles, qu’ils soient résidents ou migrants, cotisent à l’assurance-emploi par le biais de retenues salariales, mais ils ont des difficultés à accéder à cette prestation ou n’y ont pas accès. La réduction du nombre d’heures assurables pour que les travailleurs agricoles puissent bénéficier de l’assurance-emploi et l’extension de l’assurance-emploi aux travailleurs migrants, même après qu’ils ont quitté le Canada pour la saison, permettraient d’offrir aux travailleurs l’assurance-revenu dont ils ont besoin.
  • Assouplir les codes de construction pour favoriser le logement à la ferme : Plus de 38 % des travailleurs agricoles et 26 % des employeurs agricoles ont demandé aux gouvernements des comtés et des municipalités d’assouplir les codes de construction qui limitent le logement à la ferme, tout en maintenant les règlements visant à empêcher les grands développements sur les terres agricoles zonées.