L’UNF-O pose la question : Souveraineté alimentaire ou agrégat ? (Op-Ed)
par Ann Slater
Le retrait par les Highland Companies de leur demande d’exploitation d’une carrière dans le canton de Melanchton offre des pistes de réflexion intéressantes, ou plutôt du gravier. Le dernier délai pour soumettre des commentaires sur le projet de déclaration de politique provinciale (PPS) était le 23 novembre. Le PPS fournit des orientations politiques à la province et aux municipalités sur les questions liées à l’aménagement du territoire. Il fait l’objet d’une révision obligatoire tous les cinq ans.
Les organisations et les personnes soucieuses de protéger les terres agricoles et la souveraineté alimentaire de l’Ontario ont passé les deux premières semaines de novembre à étudier le dernier projet. Le 21 novembre, The Highland Companies a publié un communiqué de presse annonçant le retrait de sa demande, ce qui constitue une coïncidence intéressante.
Les organisations agricoles et les groupes de défense de l’environnement restent particulièrement préoccupés par la priorité accordée à l’extraction des ressources en agrégats par rapport à la protection des terres agricoles. Le projet le plus récent semble faciliter l’extraction de granulats dans les zones de cultures spécialisées et sur les terres agricoles de premier choix.
Dans son communiqué de presse, The Highland Companies invoque l’absence de soutien suffisant de la part de la communauté et du gouvernement pour justifier son retrait. Bien que l’absence de soutien de la part du gouvernement ait été notée, il est difficile d’identifier des mesures tangibles prises par le gouvernement provincial pour faire de la protection des terres agricoles une priorité dans les décisions relatives à l’utilisation des terres. Lors d’une audition publique en mai, de nombreux députés membres de la commission permanente chargée d’examiner la loi sur les ressources en agrégats semblaient plus enthousiastes à l’idée de l’augmentation de la demande d’agrégats due aux quelque 200 grues installées à Toronto qu’à celle de la protection des terres agricoles.
L’extraction de granulats est considérée comme une utilisation provisoire des terres agricoles dans le cadre du PPS. Cette utilisation provisoire est basée sur l’hypothèse que les terres peuvent être restaurées à la même capacité moyenne du sol et à la même superficie après l’enlèvement des agrégats sous le sol. Selon le SPP, les agrégats doivent provenir d’une source aussi proche que possible des marchés. La demande de granulats est la plus forte dans les régions les plus peuplées de la province, qui sont adjacentes aux meilleures terres agricoles de l’Ontario ou les recouvrent. Cette politique de proximité du marché ouvre la voie à un conflit permanent entre la protection des terres destinées à la production alimentaire et la fourniture de nouveaux agrégats bon marché aux promoteurs et à l’industrie. La conservation des agrégats est mentionnée mais n’est pas exigée, pas plus que la démonstration du besoin.
Le retrait de la demande de Highland nous rappelle le pouvoir que nous pouvons cultiver, en tant que citoyens, pour protéger nos communautés. Pour tous les citoyens concernés, cependant, la célébration de la décision de Highland est atténuée par la prise de conscience de l’absence persistante de protection des terres agricoles par la législation provinciale. En l’absence d’une telle protection, les communautés devront, les unes après les autres, protéger les terres agricoles locales au moyen de campagnes aussi vastes et diversifiées que celle menée par les fermiers et les citoyens de Melanchton. Il est peu probable qu’une telle dynamique puisse être maintenue année après année, communauté après communauté.
La demande d’agrégats se maintiendra. En tant que fermiers, nous continuerons à demander du gravier pour nos routes, nos chemins et nos nouveaux bâtiments agricoles. L’orientation politique consistant à s’approvisionner en agrégats le plus près possible du marché continuera à mettre en péril la protection des terres en vue d’une souveraineté alimentaire à long terme. Alors que nous célébrons la victoire populaire à Melanchton, nous devons également chercher des moyens de réduire notre dépendance à l’égard des nouveaux agrégats, de diminuer nos besoins en agrégats et de nous approvisionner en agrégats dans d’autres régions de la province. Cela signifiera probablement que nous devrons tous payer davantage pour l’agrégat. C’est un prix que nous devons être prêts à payer pour protéger notre souveraineté alimentaire pour les générations à venir.
Ann Slater est membre du conseil d’administration de et fermiere près de St. Marys, Ontario.
Vous pouvez la contacter au 519-349-2448 ou à l’adresse aslater@quadro.net.